C_Je vous écris de Benoit Labre

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"Au bout d’une semaine à Rennes, j’ai pu décrocher un travail, dans une école de Cesson !"

 

Rennes, le 29 août 2022


Très chère France,

Originaire d’un pays d’Afrique centrale, j’ai choisi l’exil pour une série de faits que je ne veux pas exhumer ici.

Mais je tenais à te dire, très chère France, que je te suis reconnaissant de l’accueil et de la prise en charge dont j’ai bénéficié. Ici, je suis en sécurité. Je me sens libre. 

J’arrive clandestinement à Mayotte en février 2019 où je vais rester jusqu’en octobre 2021. Je fais aussitôt une demande de statut de réfugiée politique. J’ai eu l’entretien avec l’Ofpra en décembre 2019. Et une réponse, positive, en juillet 2020. Le plus long, presque un an, a été d’attendre mon extrait d’acte de naissance. Après, quand on a le passeport, on peut bouger.

A cause de l’insécurité, de la délinquance, du chômage, je ne voulais pas rester à Mayotte. Quand on a des papiers, la première chose à laquelle on pense, c’est aller en métropole. 

A Mayotte, on entend dire des choses sur telle et telle ville, par des gens qui y sont venus avant, on regarde sur internet, on voit s’il y a du travail... Je me suis dit, Rennes, c’est le bon endroit.

Alors, j’ai pris un BlaBlaCar et je suis arrivée le 3 mars 2022, à République. Je revois cette nuit-là, c’était de la folie, mais ça valait la peine. Je ne connaissais personne, il était 20 h, la ville se vidait, il ne restait que les sans-abri, alors j’ai appelé le 115. 

J’ai dormi dehors le jeudi, le vendredi. Et le samedi, j’ai eu de la chance, on m’a donné une place à l’Accueil de nuit (ADN). Pendant un mois, jusqu’au 4 avril. On y mange, on y dort, mais le jour, de 8 h à 18 h 30, on est à la rue. 

Ca m’a aidée, parce que, durant les journées, j’ai fait beaucoup de démarches, la Caf, la Sécurité sociale… Et trouvé un premier emploi, dès le 11 mars, à Cesson-Sévigné. Mais comme c’est très difficile de ne travailler que deux fois deux heures par jour en étant dehors toute la journée, j’ai fait une demande. C’est comme ça que je suis arrivée ici, au Centre d’hébergement d’urgence de Benoît Labre. 

Je suis contente, parce que je suis logée gratuitement par Benoît Labre, dans un appartement à plusieurs, en ville. Au bout d’une semaine à Rennes, j’ai pu décrocher un travail ! J’ai un petit revenu, mais les transports sont gratuits.

Rennes correspond à l’idée que je m’en faisais. On peut y trouver du travail au plus vite, avoir un chez soi, être bien accueilli. J’ai droit à une formation. Ici, j’aime bien, les gens, le climat, tout. Je suis devenue un peu Bretonne sans l’avoir fait exprès ! 

L’association m’a donné un toit, une chambre, à manger, la sécurité. Saint-Benoît Labre, c’est un sauveur ! Ici, les travailleurs sociaux sont disponibles 24 h/24, ils sont gentils, ils m’ont aidée dans toutes les démarches, Sécu, logement, travail. Et il y a une infirmière…

A l’école maternelle et primaire Bourgchevreuil, j’’accompagne un enfant handicapé et je fais partie du groupe d’animation scolaire. J’aimerais avoir plus d’heures pour gagner un peu plus. Je vais commencer une formation en alternance pour obtenir un diplôme d’animatrice et espérer un temps complet. 

J’ai confiance dans la vie. J’ai eu des peurs durant mon exil, mais je me raisonnais en me disant qu’il faudra qu’un jour, de toute façon, je meure, que je ne vais pas rester éternellement sur la terre. Alors, rester au pays au risque de mourir ? Mieux vaut essayer de se sauver ! Si ça ne marche pas, tant pis, je meurs, mais mourir pour mourir, autant essayer. C’est mieux d’échouer en ayant essayé que d’échouer sans avoir essayé. 

Un jour, ça changera et un jour, peut-être, je retournerai voir mon pays. Mais c’est plus chez moi ici que là-bas. 

Pour moi, c’est un exil qui se termine bien. Merci très chère France.

Une réfugiée.

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